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Une déclaration obtenue par la défense n’a pas à être divulguée à la Poursuite

R. c. Peruta, 1992 CanLII 3597 (QC CA)

Lien vers la décision

Comme opine Alan W. Bryant[11] dans un article qui a été cité avec approbation à maintes reprises, l’article 10: (1) permet le contre-interrogatoire sur une déclaration antérieure sans comporter l’obligation d’en divulguer le contenu ou de la produire, (2) introduit une règle d’équité en faveur du témoin dans l’hypothèse où la partie veut contredire le témoin à l’aide de la déclaration, (3) autorise le juge du procès, dans l’exercice de sa discrétion, d’en ordonner dans tous les cas la production et d’en faire l’usage qu’il croit convenable.

(…)

Il est utopique de conclure à la réciprocité de cette obligation de divulguer en faveur de la poursuite et à ce sujet, je partage entièrement les vues de mon collègue le juge Tyndale.

(…)

Le jugement de la Cour Suprême du Canada dont fait ici grandement état l’auteur O’Connor est l’arrêt Stinchcombe, supra.

Avec le recul du temps, il y a lieu de citer à ce sujet ce que la Commission de Réforme du droit en disait en 1974 dans son document de travail #4 sur «la communication de la preuve» en procédure pénale:

64. Un système idéal de communication de la preuve devrait, comme c’est le cas en matière civile, comporter des règles d’application réciproque.  Cependant, en raison des principes dont nous avons déjà traité, nous sommes d’avis que la communication de la preuve en matière criminelle ne doit pas être obligatoirement une voie à deux sens.  Nous comptons, bien sûr, que dans le cadre d’un système procédural très ouvert où la couronne dévoile largement ses éléments de preuve, la défense réagira en conséquence et sera prête à admettre ce qu’elle n’entend pas contester, aussi bien qu’à divulguer certains renseignements à la couronne.  Mais il serait contraire aux principes fondamentaux de notre système de droit de vouloir contraindre la défense à agir de la sorte.

65. Il ne faudrait pas croire pour autant que dorénavant, les accusés seront entièrement libres de prendre la couronne par surprise au procès et d’empêcher ainsi le processus pénal d’atteindre son objectif.  En premier lieu on doit reconnaître que dans la préparation du procès, les procureurs de la couronne n’ont guère besoin d’obtenir communication de la preuve de la défense, et il est parfaitement normal qu’il en soit ainsi.  Les ressources humaines et matérielles dont disposent les corps policiers qui procèdent aux enquêtes, leurs pouvoirs en matière de perquisitions et de saisies, leur droit d’interroger des suspects et de faire usage de laboratoires scientifiques, n’ont aucune commune mesure avec les moyens dont dispose la défense pour faire enquête.  Tout cela n’a rien d’étonnant puisque notre système de droit impose à la couronne, et non à la défense, le fardeau de faire la preuve des accusations qu’elle porte.  Pour pouvoir s’acquitter de ce devoir, la couronne doit être en mesure d’enquêter à fond et de se préparer adéquatement pour le procès.  Cependant, la nature même de ces méthodes d’enquête et de préparation permettra à la couronne de prendre connaissance des moyens de défense et des éléments de preuve que l’accusé voudra soulever au procès.  Cette affirmation n’est pas que théorique; elle est confirmée par la pratique actuelle.[18]

                                       (j’ai souligné)

Tout comme mon collègue le juge Tyndale, je suis donc d’avis que le premier juge a erré en accordant à la poursuite l’accès aux déclarations antérieures des témoins de la défense.


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